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La co-création au théâtre : un antidote à la controverse dans la démocratie ?

Olivier Fournout
Olivier Fournout
enseignant-chercheur à Télécom Paris (IP Paris)
En bref
  • Confrontés à la polarisation croissante de la société, des chercheurs étudient comment la création collective d’une pièce de théâtre peut contribuer à renouer le dialogue.
  • Le projet prend la forme de productions artistiques menées en 2018 par des groupes de professionnels aux intérêts opposés, et impliqués dans une controverse.
  • L’objectif pour eux est de créer ensemble une pièce de théâtre d’environ 20 min, centrée sur des sujets clivants (usage des pesticides en agriculture, impact des technologies sur le réchauffement climatique).
  • Une seconde enquête a permis d’observer qu’après le processus de création collective, les participants avaient notamment une bien meilleure compréhension du contexte et des logiques des positions des autres.
  • Parmi les limites de cette approche, on note le caractère éphémère du théâtre, et le fait que cette discipline exige des moyens importants pour pouvoir être rejouée.

Usages et mésusages des pes­ti­cides en agri­cul­ture, rôle de la tech­nolo­gie dans la lutte con­tre le réchauf­fe­ment cli­ma­tique… Lors d’une dis­cus­sion sur l’écologie, la poli­tique ou divers­es ques­tions de société, n’avez-vous jamais eu l’impression de pren­dre part à un dia­logue de sourds ?  Dans une société polar­isée, le débat avec des gens qui ne parta­gent pas nos valeurs devient par­fois impos­si­ble. Une ten­dance ampli­fiée par la pro­liféra­tion de « cham­bres d’écho1», ces espaces rela­tion­nels où l’on n’interagit plus qu’avec des per­son­nes partageant nos con­vic­tions. À ce titre, une dis­ci­pline est née : la soci­olo­gie des con­tro­ver­s­es, qui étudie les dif­férents points de vue et les con­textes dans lesquels ils sont émis. Alors com­ment renouer le dialogue ?

Cette ques­tion est cen­trale dans les études menées par Sylvie Bouchet – doc­teure en psy­cholo­gie, chargée d’enseignement à l’université Paris Dauphine – et Olivi­er Fournout – maître de con­férences en sci­ences de la com­mu­ni­ca­tion au sein de l’Institut Inter­dis­ci­plinaire de l’Innovation/CNRS et Télé­com Paris/Institut Poly­tech­nique de Paris. Dans Le Champ des pos­si­bles2, ils étu­di­ent com­ment la créa­tion col­lec­tive d’une pièce de théâtre peut con­tribuer à renouer le dia­logue au sein de pop­u­la­tions frag­men­tées par de vifs con­flits. Le pro­jet prend la forme de pro­duc­tions artis­tiques menées en 2018 par des groupes de pro­fes­sion­nels – agricul­teurs, mil­i­tants écol­o­gistes, entre­pre­neurs, experts, admin­is­trat­ifs du secteur pub­lic ou privé, respon­s­ables d’associations – impliqués dans une con­tro­verse. L’objectif : créer ensem­ble des pièces de théâtre de 25 min­utes cen­trées sur des sujets cli­vants, comme les pes­ti­cides dans l’agriculture ou l’impact des tech­nolo­gies dans le réchauf­fe­ment cli­ma­tique. Les per­son­nes impliquées ont le champ libre pour met­tre en scène leur pro­pre pièce, qu’ils écrivent et inter­prè­tent eux-mêmes.

Deux ans après la créa­tion, la moitié des par­tic­i­pants con­sid­èrent que quelque chose a changé dans leur façon de se situer dans la controverse.

L’ouvrage s’enrichit des résul­tats d’une enquête menée auprès des par­tic­i­pants, visant à éval­uer com­ment le tra­vail créatif com­mun a pu « mod­i­fi­er leur per­cep­tion du débat, des autres pro­tag­o­nistes, des don­nées du prob­lème3 ». En out­re, en juil­let 2020, une sec­onde enquête4 a été menée auprès d’eux afin de décrire les effets de l’expérience sur le long terme. Par­mi les con­stats dressés : deux ans après la créa­tion, « la moitié des par­tic­i­pants (56 %) con­sid­èrent que quelque chose a changé dans leur façon de se situer dans la con­tro­verse5 », et les mul­ti­ples niveaux de change­ments sont spécifiés.

Pour par­ler de la créa­tion de lien dans une société où les inter­ac­tions sont très vite incen­di­aires, c’est donc à un dia­logue avec Olivi­er Fournout que nous vous con­vions, qui nous appa­raît ici réparateur. 

Quel a été le point de départ de vos travaux, visant à faire dialoguer par la voie de la mise en scène théâtrale des citoyens aux positions parfois contraires, et que l’on jugerait presque irréconciliables de prime abord ?

Olivi­er Fournout. Le point de départ est le con­stat que dans nos sociétés, les divi­sions et les con­tro­ver­s­es sont attisées en per­ma­nence dans la cham­bre d’écho médi­a­tique et sur les réseaux soci­aux. Il y a du cli­vage, de l’irréconciliable. Face à toute réal­ité – même sci­en­tifique et recon­nue – l’on est entraînés poli­tique­ment et éthique­ment dans des spi­rales de vio­lence. Les dif­férentes pop­u­la­tions en affron­te­ment ne se par­lent plus, ou ne par­lent qu’à des sem­blables et ignorent ce qu’il se passe à côté. Ces sociétés de divi­sion sont étudiées par la soci­olo­gie des controverses.

Fort de ce con­stat, ma per­spec­tive a été d’aider les citoyens et les élèves à se saisir de con­tro­ver­s­es pour, à la fois, en com­pren­dre les ressorts et ten­ter de les sur­mon­ter. Après les avoir étudiées et par­fois vécues directe­ment, les per­son­nes impliquées s’inscrivent dans la con­struc­tion d’une créa­tion théâ­trale col­lec­tive trai­tant de la con­tro­verse. Cette démarche a été accom­pa­g­née d’une ques­tion de recherche cen­trale : qu’est-ce que le proces­sus de créa­tion artis­tique col­lec­tive change au vécu des per­son­nes en con­tro­verse ? Qu’est-ce que la pro­duc­tion théâ­trale peut apporter de spé­ci­fique en ter­mes de représen­ta­tion de la con­tro­verse, et com­ment celle-ci est ren­due sen­si­ble pour le pub­lic ? Grâce aux moyens d’un con­trat ANR6, nous avons pu met­tre en place un proces­sus d’étude empirique de ces effets, per­me­t­tant d’en faire un objet de recherche.

Quelle a été la méthodologie à l’œuvre pour aider les gens à se parler, même s’ils se sont construits autour d’idées opposées ?

Cette méthodolo­gie de mise en théâtre, je l’ai effec­tuée plus de 150 fois : avec des élèves et des citoyens, mais aus­si, plusieurs fois, avec des comé­di­ennes pro­fes­sion­nelles sur le sujet du tran­shu­man­isme7. Le proces­sus de créa­tion col­lec­tive est sta­bil­isé. Un doc­u­men­taire de cinquante min­utes, tourné en 2018, rend compte de ce proces­sus8. À chaque fois, on part d’un phénomène socié­tal étudié et/ou vécu. Le temps de créa­tion est court. Les par­tic­i­pants créent en deux jours une pièce de 20–25 min­utes et la jouent devant un pub­lic. Il y a beau­coup d’improvisation, y com­pris dans la représen­ta­tion finale. Les per­son­nes qui, la plu­part du temps, n’ont jamais fait de théâtre, peu­vent se retrou­ver à l’aise dans l’improvisation et jouer très juste, très vivant, très naturel, alors que ce serait moins le cas si elles réc­i­taient un texte appris par cœur. Les choix de mise en scène, le jeu et le texte sont entière­ment assumés par les groupes de créa­tion. Les accom­pa­g­na­teurs du proces­sus font des feed­backs, mais le groupe et sa dimen­sion col­lec­tive déci­dent tou­jours à la fin. Les règles du jeu sont partagées avec le groupe en amont, et la créa­tiv­ité naît dans ce cadre. J’ai testé ce for­mat de créa­tion col­lec­tive pour la pre­mière fois en 2009, dans un cours très inno­vant pour le Corps des Mines, mêlant géolo­gie sur le ter­rain, théâtre et obser­va­tion des dynamiques de groupes. Ce cours, qui existe tou­jours, a don­né lieu à une com­mu­ni­ca­tion en sci­ences de l’éducation en 20119.

Vous partez de controverses variées : des pesticides, aux rapports entre technologie et réchauffement climatique, en passant par la question du mariage pour tous… Comment ces personnes vivent-elles la controverse en temps réel ?

Pour revenir sur la con­tro­verse du mariage pour tous, nous avons sor­ti une pub­li­ca­tion de recherche en 2017 avec Valérie Beau­douin sur cette créa­tion théâ­trale mise en place en 201310. Ce qui était très fort avec le groupe d’étudiants qui y a par­ticipé, c’est que les per­son­nes qui s’étaient inscrites volon­taire­ment à cette mise en théâtre pour met­tre en scène la con­tro­verse étaient pour la plu­part très con­cernées par le sujet. Des étu­di­ants étaient venus s’inscrire en dis­ant qu’ils n’arrivaient plus à en dis­cuter entre eux et qu’ils souhaitaient ouvrir le dia­logue. C’est pour cela qu’ils se sont inscrits, et une étu­di­ante a notam­ment con­fié à cette occa­sion être très con­cernée par le sujet. Cela a con­féré au tra­vail de ce groupe d’étudiants une tonal­ité par­ti­c­ulière, parce qu’il ne s’agissait pas juste d’étudier la con­tro­verse. Quelque chose de vive­ment vécu pas­sait par la création.

Pour les ques­tions des pes­ti­cides et pour savoir si la tech­nique aide ou non à lut­ter con­tre le change­ment cli­ma­tique, nous avons eu des moyens pour faire une enquête et objec­tiv­er les effets provo­qués chez les par­tic­i­pants de la créa­tion col­lec­tive. Dans la pièce sur les pes­ti­cides, jouaient un agricul­teur bio, un autre qui traite ses plus de cent hectares au glyphosate, un con­seiller tech­nique pour les grandes exploita­tions, un mil­i­tant écol­o­giste, la respon­s­able d’une asso­ci­a­tion, un médecin agréé d’une mutuelle de san­té agri­cole et lui-même vitic­ul­teur. Avec ce pan­el, on atteint le degré max­i­mal de représen­ta­tiv­ité de la con­tro­verse. Cela est éprou­vant, sans con­ces­sion, car il y a vrai­ment, au départ, une rup­ture, une peur des par­tic­i­pants à l’idée de se faire atta­quer. Par exem­ple, l’agriculteur qui nap­pait ses ter­rains de glyphosate pen­sait qu’il allait « se faire lynch­er ». D’une cer­taine façon, on a un ter­reau empirique où l’on part de très loin dans la divi­sion et le risque de blessures.

Pour la pièce sur le mariage pour tous, nous n’avions pas pu procéder à l’époque à une enquête auprès des étu­di­ants sur le proces­sus de créa­tion col­lec­tive, mais le con­tenu même de la pièce de théâtre porte la trace de résul­tats très posi­tifs. Alors qu’ils n’étaient pas du tout d’accord entre eux, les élèves avaient réus­si à dessin­er une frise avec six représen­ta­tions de cou­ples dif­férents, pro­jetées au cours de la pièce, qu’avec Valérie Beau­douin nous avons repro­duites dans notre arti­cle. D’une cer­taine façon, la pièce de théâtre a donc accouché d’un mod­èle de diver­sité, alors même que les étu­di­ants s’opposaient à pro­pos de ces représen­ta­tions dans l’espace pub­lic. Un autre acquis est le nom que s’est don­née la troupe de théâtre, appelée « théâtre pour tous », qui résume assez bien la force de réu­nion du théâtre – comme, par exem­ple, une pièce de Shake­speare va réu­nir Fal­staff et le futur Hen­ry V dans une tav­erne. En résumé, les étu­di­ants ont réus­si à trou­ver du com­mun via le théâtre, là où le sujet divi­sait, ce qui est à la fois touchant et efficace.

Finalement, est-ce que dans le cas de vos études sur les pièces montées sur la question des pesticides et des technologies dans leur rapport à l’écologie, les citoyens ont « changé d’avis » ?

Chang­er d’avis n’est pas quelque chose que l’on peut plac­er comme un objec­tif imposé. Ce que nous avons pu observ­er avec notre sec­onde enquête con­duite en 2020, c’est qu’il y avait, après le proces­sus de créa­tion col­lec­tive, une bien meilleure com­préhen­sion du con­texte et de la logique des posi­tions des autres, une sen­si­bil­ité à l’égard des his­toires per­son­nelles et une ouver­ture au dia­logue, mis en acte avec les per­son­nes avec lesquelles, jusqu’ici, on n’arrivait pas à dis­cuter. De la fréquen­ta­tion des posi­tions advers­es, perçues d’abord comme les pires enne­mies dans la con­tro­verse, finis­sent par naître l’empathie et l’émotion, ce qui est un résul­tat fan­tas­tique. Fan­tas­tique, car ce pre­mier résul­tat ouvre la voie à des avancées sur le plan cog­ni­tif : deux ans après l’expérience, 70 % des par­tic­i­pants déclar­ent avoir appris des choses de l’ordre de la « réflex­ion » et des « pensées ».

Le point clé est sans doute ici le proces­sus de créa­tion théâ­trale, qui fait se rejoin­dre des per­son­nes qui ne se par­lent plus dans la vie, et qui crée un objet com­mun autour duquel se noue le dia­logue. En effet, les élé­ments de con­tro­verse de la pièce, comme le thème des pes­ti­cides, sont pris dans l’obligation d’arriver à faire ensem­ble une pièce de théâtre. Cette oblig­a­tion, plus forte que les sujets de dis­corde, per­met de retiss­er les liens, ou bâtir ce que j’appelle dans le livre une « écolo­gie rela­tion­nelle », devenant la con­di­tion de pos­si­bil­ité de tout pro­grès sur le fond. En résumé, il y a d’abord à tra­vailler l’écologie des rela­tions humaines pour par­venir ensuite à des résul­tats en écolo­gie de la nature, qui demande la con­tri­bu­tion de toutes et tous dans la recherche des solu­tions. Le proces­sus théâ­tral per­met de restau­r­er une forme d’alliance pour déjà réus­sir à co-créer la pièce de théâtre – pièce de théâtre qui elle-même est un dia­logue qui tra­vaille le fond du problème.

Avez-vous cependant rencontré des limites dans votre approche ? Dans votre enquête de 2020, les participants vous disent qu’ils auraient aimé être accompagnés sur le temps long, après les deux créations théâtrales collectives réalisées en 2018… Comment analysez-vous cette limite de vos travaux ?

Par­mi les lim­ites de l’approche, le théâtre est une dis­ci­pline très éphémère qui demande beau­coup de moyens pour être rejouée. Par exem­ple, nous avons mon­té deux pièces de théâtre dans les Deux-Sèvres, en parte­nar­i­at avec une « Zone Ate­lier » du CNRS en agroé­colo­gie (Cen­tre d’Étude Biologique de la Forêt de Chizé) et la société WISION, spé­cial­isée en médi­a­tion sur les ter­ri­toires. Le sujet était les rela­tions entre agricul­teurs et habi­tants. Les pièces ont été créées et jouées par des agricul­teurs et des habi­tants du secteur, rejoints par quelques étu­di­ants. Les deux pièces de théâtre que nous avons filmées11 se sont très bien passées, et nous nous sommes quit­tés en nous dis­ant qu’il faudrait les rejouer. Mais les volon­tés et les ressources ne sont pas for­cé­ment présentes pour le faire, et trou­ver des lieux de dif­fu­sion est dif­fi­cile. C’est un proces­sus très fort sur le plan exis­ten­tiel, émo­tion­nel et affec­tif, impli­quant les corps, mais qui ne se repro­duit pas facilement.

Il faut des dis­posi­tifs qui tra­vail­lent la rela­tion pour tra­vailler ensuite les change­ments de pra­tiques et de valeurs.

En 2020, en plein con­fine­ment COVID, nous avons mon­té avec Cyrille Bom­bard, qui exerce le méti­er de médi­a­teur socié­tal, un dis­posi­tif de dia­logue nom­mé ZigZa­g­Zoom12. Nous faisons se ren­con­tr­er trois per­son­nes en faveur d’une posi­tion et trois per­son­nes en défaveur de celle-ci, avec un pub­lic par­tic­i­patif de dix à quinze per­son­nes. Nous arrivons au même con­stat : les change­ments de com­porte­ments et d’attitudes ne peu­vent venir que si l’on tra­vaille d’abord le ter­reau rela­tion­nel. Ce résul­tat est prob­a­ble­ment général­is­able. Ce ne sont pas les dis­cours d’experts, aus­si nom­breux et com­pé­tents soient-ils, qui provo­quent le change­ment, et si cela fonc­tion­nait, bien des prob­lèmes seraient déjà réso­lus. Ce qui le per­met en revanche, c’est d’abord de tiss­er des liens autour des per­cep­tions des uns et des autres. Il faut des dis­posi­tifs qui tra­vail­lent la rela­tion pour tra­vailler ensuite les change­ments de pra­tiques et de valeurs.

Les par­tic­i­pants de notre enquête de 2020 ont eu une attente déçue par rap­port au cadre de l’expérimentation, dont ils attendaient qu’il les accom­pa­gne après l’expérience théâ­trale col­lec­tive.  Effec­tive­ment, il s’agit d’une lim­ite que je n’ai pas réus­si à traiter, car la recherche est très dépen­dante de finance­ments lim­ités dans le temps et par pro­jet. Lorsque le finance­ment s’arrête, il n’y a plus de suivi car les moyens chutent d’un coup. Je ne peux plus tra­vailler, par exem­ple, avec mon col­lègue médi­a­teur socié­tal, qui aurait la volon­té de pour­suiv­re l’effort pour ancr­er les change­ments amor­cés et faire vivre le dis­posi­tif sur la durée.

Pensez-vous, plus largement, que la fiction puisse apporter quelque chose à nos sociétés ? On a souvent l’idée que la fiction invente, et donc divise…

Dans notre pièce de théâtre sur les pes­ti­cides en 2018, un nou­veau per­son­nage mythologique est apparu : « le petit champ malade ». Ce per­son­nage est une inno­va­tion de la troupe. Il n’est cité dans aucune des ency­clopédies de l’imaginaire que j’ai con­sultées. C’est une inven­tion de la pièce qui, peut-être, un jour, chang­era le monde. Met­tre au cen­tre de l’Histoire une inven­tion fic­tion­nelle comme « un petit champ malade », c’est déjà s’entraîner à le soign­er. Voir, c’est déjà faire, comme ten­dent à le mon­ter les travaux sur les neu­rones miroirs13. Ain­si, les actions fic­tion­nelles sur une scène de théâtre, surtout quand elles ont été créées par les per­son­nes mêmes qui sont impliquées dans les prob­lèmes de nos sociétés, ouvrent au dépasse­ment des divi­sions. Elles inspirent nos manières de con­stru­ire ensem­ble un futur com­mun. Con­di­tion sans doute néces­saire et pri­mor­diale à la réso­lu­tion des problèmes.

Propos recueillis par Lucille Caliman
1M. Cinel­li, G. De Fran­cis­ci Morales,  A. Galeazzi, W. Quat­tro­cioc­chi,  & M. Starni­ni,  The echo cham­ber effect on social media, Proc. Natl. Acad. Sci. U.S.A. 118 (9) e2023301118, https://​doi​.org/​1​0​.​1​0​7​3​/​p​n​a​s​.​2​0​2​3​3​01118 (2021).
2FOURNOUT Olivi­er, BOUCHET Sylvie, Le Champ des pos­si­bles. Dia­loguer autrement pour agir, SiK­iT édi­tions, 2019
3FOURNOUT Olivi­er, BOUCHET Sylvie, Le Champ des pos­si­bles. Dia­loguer autrement pour agir, SiK­iT édi­tions, 2019, p.24
4BOUCHET Sylvie, FOURNOUT Olivi­er, « Effets à long terme de la créa­tion théâ­trale col­lec­tive sur des enjeux d’écologie », in LET­Té Michel, TOURNIER Frédéric (dir.), Au théâtre des sci­ences, édi­tion sci­en­tifique par Anto­nia Amo Sánchez et al., Édi­tions Uni­ver­si­taires d’Avignon, 2023, https://​doi​.org/​1​0​.​4​0​0​0​/​b​o​o​k​s​.​e​u​a​.7570.
5Ibid., p. 378
6Agence Nationale de la Recherche, con­trat FORCCAST ini­tié par Bruno Latour – For­ma­tion par la car­togra­phie des con­tro­ver­s­es à l’analyse des sci­ences et des tech­niques, ANR­11­IDEX­0005­02, 2013­2020.
7FOURNOUT Olivi­er, « La fic­tion con­struc­trice de dia­logue. Retour sur trois mis­es en film, théâtre et roman de la con­tro­verse sur le tran­shu­man­isme », in FOURNOUT Olivi­er (dir.), dossier « La fic­tion-enquête », Com­mu­ni­ca­tion & Lan­gages, 2021, n°210.
8Fic­tion­nal­i­sa­tion de deux con­tro­ver­s­es sur le glyphosate et le réchauf­fe­ment cli­ma­tique, réal­i­sa­tion d’éric Mounier : https://​www​.youtube​.com/​w​a​t​c​h​?​v​=​u​o​7​A​z​R​t5y9U
9Corten-Gualtieri P., Fournout O. et al., « Des étu­di­ants réalisent un sketch théâ­tral ou un clip vidéo pour faire évoluer leurs pré­con­cep­tions », Actes du col­loque Ques­tions de Péd­a­gogie dans l’Enseignement Supérieur, Angers, 7–10 Juin 2011.
10FOURNOUT Olivi­er, BEAUDOUIN Valérie., « L’art pour la péd­a­gogie : mise en théâtre de la con­tro­verse sur le mariage pour tous », in Ques­tions de Péd­a­gogie dans l’En­seigne­ment Supérieur, Juin 2017, Greno­ble, France. ⟨hal-02191766⟩
11Un film d’une dizaine de min­utes est disponible sur ces expéri­men­ta­tions : https://​www​.youtube​.com/​w​a​t​c​h​?​v​=​0​7​y​e​4​H​lBR2o
12https://​zigza​g​zoom​.org/​?​P​a​g​e​P​r​i​n​c​ipale
13Riz­zo­lat­ti, Gia­co­mo and Sini­gaglia, Cor­ra­do (2008), Mir­rors in the Brain: How our minds share Actions, Emo­tions, and Expe­ri­ence, Oxford Uni­ver­si­ty Press.

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