Accueil / Chroniques / Adaptation climatique : pourquoi a-t-on besoin d’investissements privés
tribune07_Climat_FR‑2
π Géopolitique π Planète π Économie

Adaptation climatique : pourquoi a‑t-on besoin d’investissements privés

Manuela Dupre
Manuela Dupré
étudiante en Master "Economics for smart cities and climate policy" à l'École polytechnique (IP Paris)
Patricia Crifo
Patricia Crifo
professeure d’économie à l’École polytechnique (IP Paris), chercheuse au CREST (CNRS) et chercheuse associée à CIRANO
En bref
  • Les effets du changement climatique s’amplifient, il est essentiel d'intensifier les mesures d'adaptation pour limiter les dégâts et d'exploiter les opportunités potentielles.
  • La COP28 a marqué un changement significatif dans l'orientation du financement du climat, en particulier dans le domaine des mesures d'Adaptation.
  • Les financements de l’Adaptation par les pays développés doivent nécessairement doubler d’ici 2025.
  • Diverses solutions ont été proposées, telles qu’un financement mixte, des garanties et des co-financements pour mobiliser davantage de capitaux privés.

Lors de la COP28, un agen­da cri­tique et de plus en plus pres­sant a été mis sous les pro­jecteurs : le finance­ment du cli­mat et les besoins financiers crois­sants pour les mesures d’Adap­ta­tion. La let­tre de la prési­dence de la COP28 aux par­ties l’indique claire­ment. L’ac­cent y est mis à la fois sur le respect des anci­ennes promess­es et sur la mise en place d’un cadre pour un accord sur le finance­ment. « Nous deman­dons instam­ment aux pays dévelop­pés de veiller à ce que l’ob­jec­tif de dou­bler le finance­ment de l’Adap­ta­tion d’i­ci 2025 soit en bonne voie, comme con­venu lors de la COP26 (…) De plus, nous avons reçu un fort sou­tien à l’idée que le cadre de l’AGC doive con­duire à une action col­lec­tive plus pro­fonde sur le finance­ment de l’Adap­ta­tion »1.

La con­férence s’est ouverte sur l’adop­tion du fond « loss and dam­age » (perte et dom­mage), suiv­ie d’un finance­ment ini­tial annon­cé par plusieurs pays, dont l’Alle­magne, la France et les Émi­rats arabes unis. Cela témoigne de l’im­por­tance crois­sante accordée à la mobil­i­sa­tion de cap­i­taux en faveur des pays les plus touchés et d’un con­sen­sus gran­dis­sant sur les défis aux­quels sont con­fron­tées les économies émer­gentes2. En effet, bien que les effets du change­ment cli­ma­tique soient vis­i­bles dans le monde entier, les pays émer­gents sont en pre­mière ligne de la crise. Ils sont les plus sévère­ment touchés par l’ac­céléra­tion des cat­a­stro­phes naturelles, des inon­da­tions et des sécheresses.

Si l’on con­state une aug­men­ta­tion notable du finance­ment glob­al de la lutte con­tre le dérè­gle­ment cli­ma­tique, l’ac­cent mis par ces fonds sur les straté­gies d’adap­ta­tion reste lim­ité3. Entre 2016 et 2021, seuls 25 % des finance­ments cli­ma­tiques mobil­isés pour les pays en développe­ment ont ciblé l’adap­ta­tion, et en 2021, le finance­ment de l’adap­ta­tion a même bais­sé de 4 mil­liards de dol­lars4. Alors que les effets du change­ment cli­ma­tique s’ac­célèrent et s’ag­gravent, il est essen­tiel d’in­ten­si­fi­er les mesures d’adap­ta­tion afin de lim­iter les dégâts et d’ex­ploiter les oppor­tu­nités poten­tielles. Finale­ment, alors que le déficit de finance­ment de l’Adap­ta­tion s’ac­croît, il est peu prob­a­ble que l’aug­men­ta­tion des fonds publics inter­na­tionaux suff­ise à le combler.

Investissements privés dans l’Adaptation

L’Adap­ta­tion décrit le proces­sus d’a­juste­ment aux effets actuels et futurs du change­ment cli­ma­tique, afin de mod­ér­er les dom­mages, de les min­imiser ou de tir­er par­ti des oppor­tu­nités qui peu­vent se présen­ter5. Les mesures d’Adap­ta­tion sont var­iées, allant de la diver­si­fi­ca­tion des cul­tures par les agricul­teurs au développe­ment d’in­fra­struc­tures résis­tantes au cli­mat. Comme l’a recon­nu le maire d’Is­tan­bul, Ekrem İmamoğlu, lors de la con­férence de la BERD (Banque Européenne pour la Recon­struc­tion et le Développe­ment) inti­t­ulée « Green Cities : Scal­ing-up Finance for Sus­tain­able Urban­i­sa­tion » qui s’est tenue le 6 décem­bre lors de la COP28 : « Il est essen­tiel de don­ner la pri­or­ité aux pro­jets d’Adap­ta­tion et il y a un besoin urgent de sou­tien financier ». Tra­di­tion­nelle­ment con­sid­érée comme une pro­tec­tion des sociétés con­tre les effets néfastes du change­ment cli­ma­tique, l’ac­tion d’Adap­ta­tion était con­sid­érée comme une respon­s­abil­ité gou­verne­men­tale reposant sur des investisse­ments publics. Plus l’Adap­ta­tion est lais­sée de côté, plus les pertes et les dom­mages sont impor­tants : c’est le cer­cle vicieux de vul­néra­bil­ité cli­ma­tique et économique. Et même si l’Adap­ta­tion a générale­ment été con­sid­érée comme moins impor­tante que l’At­ténu­a­tion, cette fois-ci, « L’Adaptation a eu son heure de gloire à la COP28 », comme l’a déclaré Tara L. Guel­ing du Light­smith Group.

La mobil­i­sa­tion du finance­ment privé pour les investisse­ments publics a été précédem­ment con­sid­érée dans le con­texte de la dette publique sur les marchés des cap­i­taux. Cepen­dant, l’an­née dernière, avec les défis de la pandémie de COVID-19 et la guerre en Ukraine, la capac­ité d’emprunt des pays en développe­ment s’est détéri­orée, tout comme leur capac­ité d’in­vestisse­ment pub­lic nation­al dans l’Adap­ta­tion. Ain­si, au fil des ans, le finance­ment de l’Adap­ta­tion a été prin­ci­pale­ment stim­ulé par une aug­men­ta­tion du finance­ment pub­lic mul­ti­latéral pour le cli­mat, les prêts étant con­sid­érés comme l’in­stru­ment le plus fréquem­ment utilisé.

Cepen­dant, lors de la COP28, la néces­sité d’im­pli­quer d’autres acteurs a été explicite­ment men­tion­née, car le déficit de finance­ment de l’Adap­ta­tion s’ac­croît de manière sig­ni­fica­tive. Le dernier rap­port sur le déficit d’Adap­ta­tion esti­mait qu’au cours de cette décen­nie, les coûts atteindraient 215 à 387 mil­liards de dol­lars par an pour les pays en développe­ment6. Par con­séquent, plusieurs inter­venants et con­férences ont plaidé en faveur d’une plus grande impli­ca­tion du secteur privé pour inten­si­fi­er les efforts de lutte et d’Adap­ta­tion à la crise climatique.

Les investisse­ments dans l’at­ténu­a­tion du change­ment cli­ma­tique, tels que les infra­struc­tures d’én­ergie renou­ve­lable, ont béné­fi­cié d’un sou­tien beau­coup plus impor­tant que les investisse­ments dans l’Adap­ta­tion de la part du secteur privé au cours des années précédentes.

Les investisse­ments d’at­ténu­a­tion du change­ment cli­ma­tique, tels que les infra­struc­tures d’én­ergie renou­ve­lable, ont reçu beau­coup plus de sou­tien que les investisse­ments d’Adap­ta­tion de la part du secteur privé ces précé­dentes années. Comme l’a indiqué Suzanne Gaboury de la Banque Asi­a­tique de Développe­ment, lors de l’événement organ­isé par l’OCDE le 3 décem­bre dans le cadre de la COP28, « Seuls 2 % des finance­ments pour l’Adap­ta­tion prove­naient du secteur privé et les obsta­cles ont été très com­plex­es pour eux. En ce qui con­cerne le mod­èle de revenus, l’Adap­ta­tion est con­sid­érée comme un coût sup­plé­men­taire, alors que l’At­ténu­a­tion est perçue comme une oppor­tu­nité. L’Adap­ta­tion est très sub­jec­tive par rap­port à l’At­ténu­a­tion, ce qui peut retarder l’in­vestisse­ment poten­tiel. Il existe des oppor­tu­nités, mais les out­ils appro­priés font défaut et il n’y a pas de nor­mal­i­sa­tion. Il serait très impor­tant d’ac­croître les approches de cadres nor­mal­isés. »

Par ailleurs, comme l’a­joute Amar Bhat­tacharya de la Brook­ings Insti­tu­tion, le prin­ci­pal défi de l’Adap­ta­tion est qu’elle « se con­cen­tre sur des pro­jets à petite échelle et très spé­ci­fiques au con­texte. Et cela ne fonc­tionne pas très bien pour les investis­seurs. Il est néces­saire de mieux faire cor­re­spon­dre les car­ac­téris­tiques des pro­jets d’Adap­ta­tion aux attentes des investis­seurs. Elle est égale­ment dif­fi­cile à met­tre en œuvre parce qu’elle n’est pas très généra­trice de revenus. La plu­part des pro­jets d’Adap­ta­tion entraî­nent des économies plutôt que des revenus. Il est donc néces­saire de ren­dre les pro­jets d’Adap­ta­tion crédi­bles du point de vue des investis­seurs en s’ap­puyant sur des struc­tures d’a­gré­ga­tion et des struc­tures de ren­force­ment du crédit. »

Augmenter les investissements dans l’Adaptation

Quelques domaines d’ac­tion visant à aug­menter les sources de finance­ment actuelles et à déblo­quer des fonds sup­plé­men­taires pour l’Adap­ta­tion ont été dis­cutés lors de la COP28, notam­ment en ce qui con­cerne le secteur privé. Les prin­ci­paux domaines d’ac­tion mis en avant sont le sou­tien aux pays en développe­ment pour ren­forcer leurs capac­ités insti­tu­tion­nelles, leurs poli­tiques et leurs marchés. Le rôle stratégique que le finance­ment du développe­ment, et plus par­ti­c­ulière­ment les instru­ments de finance­ment mixtes, doivent jouer pour mobilis­er des fonds privés en faveur de l’Adap­ta­tion a égale­ment été évoqué.

Divers fac­teurs sont néces­saires pour réduire les risques d’in­vestisse­ment perçus par les investis­seurs, tels que la sta­bil­ité économique ou l’É­tat de droit. Pour l’Adap­ta­tion ‚il est essen­tiel d’ac­croître la disponi­bil­ité des don­nées rel­a­tives au cli­mat afin d’al­louer effi­cace­ment les investisse­ments ayant un impact sur l’Adap­ta­tion. C’est ce qu’a souligné Deb­bie Palmer, direc­trice du finance­ment cli­ma­tique au sein du gou­verne­ment bri­tan­nique : « L’un des prin­ci­paux obsta­cles aux investisse­ments dans les économies émer­gentes est le manque de don­nées, ce qui affecte la capac­ité des investis­seurs à éval­uer avec pré­ci­sion les risques et à estimer le ren­de­ment. Les marchés publics ont une occa­sion unique de con­tribuer à ren­forcer la con­fi­ance et de cor­riger les idées fauss­es sur les risques du marché. »

L’amélio­ra­tion des don­nées peut donc con­tribuer à réduire les préjugés et à accroître la trans­parence, et donc à catal­yser les investisse­ments privés dans les efforts d’adap­ta­tion. Les asymétries d’in­for­ma­tion et les lacunes en matière de con­nais­sances freinent grande­ment les investis­seurs privés. C’est un obsta­cle qu’il est essen­tiel de résoudre7

Aus­si, les acteurs du développe­ment inter­na­tion­al peu­vent jouer un rôle essen­tiel en déblo­quant des fonds privés pour l’Adap­ta­tion. C’est par­ti­c­ulière­ment le cas pour les pro­jets qui devraient génér­er des revenus sta­bles, mais qui ne sont pas encore com­mer­ciale­ment viables – et pour lesquels les financiers du développe­ment peu­vent aider à sur­mon­ter les obsta­cles ini­ti­aux. Le finance­ment mixte a joué un rôle cen­tral lors de la COP28 et est apparu comme un moyen inno­vant d’amélior­er les ren­de­ments et de réduire les risques encou­rus par les investis­seurs privés. Le finance­ment mixte est défi­ni par l’OCDE comme « l’u­til­i­sa­tion stratégique du finance­ment du développe­ment pour la mobil­i­sa­tion de fonds sup­plé­men­taires en faveur du développe­ment durable dans les pays en développe­ment. »

Le recours au finance­ment du développe­ment peut attir­er stratégique­ment les investis­seurs privés en met­tant en évi­dence la via­bil­ité des investisse­ments d’Adap­ta­tion et en dévelop­pant leur con­fi­ance vis-à-vis d’un nou­veau mod­èle d’en­tre­prise ou d’un nou­veau type d’in­vestis­seur8. Le Fonds d’Ac­tion pour le cli­mat dans les marchés émer­gents (EMCAF) illus­tre cette ini­tia­tive grâce au parte­nar­i­at entre Allianz Glob­al Investors et la Banque Européenne d’In­vestisse­ment. Ces ini­tia­tives per­me­t­tent un finance­ment par actions à un stade pré­coce pour des pro­jets durables dans les marchés émer­gents, en met­tant forte­ment l’ac­cent sur l’Adap­ta­tion9. Comme l’a souligné Mile­na Mes­sori, chef de divi­sion à la Banque Européenne d’In­vestisse­ment, « L’Adap­ta­tion au cli­mat est finan­cière­ment viable, et nous devons atténuer les risques pour attir­er le secteur privé. En l’oc­cur­rence, nous util­isons des fonds publics pour amor­tir les pre­mières pertes poten­tielles. Il est impor­tant de not­er qu’il ne s’ag­it pas seule­ment du risque lui-même, mais de la per­cep­tion du risque, qui est beau­coup plus impor­tante. Nous pou­vons réduire les risques d’in­vestisse­ment en don­nant l’as­sur­ance que les ini­tia­tives sont solides et qu’elles auront un impact ain­si que des retombées pos­i­tives. »

Les four­nisseurs inter­na­tionaux ont un rôle clé à jouer dans la mobil­i­sa­tion des fonds privés. Comme le souligne Jen­nifer Mor­gan, de l’Of­fice Fédéral Alle­mand, « Les ban­ques mul­ti­latérales de développe­ment doivent accroître l’u­til­i­sa­tion des garanties et intro­duire dif­férents out­ils avec des visions à court et à long terme. » De même, Jamal Saghir, Pro­fesseur à l’u­ni­ver­sité McGill, ajoute que « Si nous n’améliorons pas le cap­i­tal des con­ces­sions, le secteur privé ne se man­i­festera pas ». De plus, il existe des instru­ments nova­teurs, tels que la con­ver­sion de la dette en faveur de la nature, pour encour­ager les pays à se con­cen­tr­er sur les mesures d’Adaptation.

Lors de la COP28, GAIA, un finance­ment mixte axé sur le change­ment cli­ma­tique et dirigé par MUFG et FinD­ev Cana­da, l’in­sti­tu­tion finan­cière de développe­ment bilatéral du Cana­da, a été recon­nu comme une plate­forme inno­vante de pre­mier plan pour mobilis­er la par­tic­i­pa­tion du secteur privé à grande échelle. Lori Kerr de FinD­ev explique que « GAIA est une plate­forme de 1,5 mil­liard de dol­lars axée sur 25 marchés émer­gents d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine. Il est impor­tant de not­er que 70 % du total des investisse­ments de son porte­feuille seront con­sacrés à des pro­jets d’adap­ta­tion dans les pays les plus vul­nérables au cli­mat dans le monde. Nous four­nissons des prêts à long terme provenant de sources qui n’é­taient pas disponibles aupar­a­vant. Je suis ent­hou­si­as­mé par le rôle que peu­vent jouer les cap­i­taux privés – l’ar­gent est là, et je suis impa­tient de savoir com­ment déblo­quer ces cap­i­taux. »

Cette ini­tia­tive illus­tre la néces­sité de dis­pos­er de davan­tage de patient cap­i­tal10 pour répon­dre de manière adéquate aux investisse­ments à long terme con­cer­nant les pro­jets d’Adap­ta­tion. Cer­tains inter­venants ont toute­fois pré­cisé com­ment ils perce­vaient l’ac­cent mis sur « l’innovation ». Pour Mar­tin Ewald, directeur général du Fonds EMCAF : « Ce dis­cours sur l’in­no­va­tion, je ne suis pas sûr qu’il soit le bon, car nous devons nous appuy­er sur la con­fi­ance pour mobilis­er des cap­i­taux privés. Pour moi, l’in­no­va­tion réside dans l’ap­pli­ca­tion, dans la manière dont nous définis­sons et met­tons l’ac­cent sur l’Adap­ta­tion. »

Soutien aux projets d’Adaptation en cours

Au fil des con­férences et des con­ver­sa­tions, Mimi Ale­mayehou, leader dans le domaine du finance­ment du développe­ment, souligne la men­tion récur­rente du « manque de pro­jets rentable ». Il est, en effet, néces­saire d’aider les économies émer­gentes à iden­ti­fi­er et à dévelop­per des pro­jets d’Adap­ta­tion sus­cep­ti­bles d’at­tir­er et de sat­is­faire les exi­gences des investis­seurs inter­na­tionaux du secteur privé. Des organ­i­sa­tions inno­vantes, telles qu’Al­lied Cli­mate Part­ners, sont apparues lors de divers­es con­férences sur la mobil­i­sa­tion de cap­i­taux privés dans les pays émer­gents et les véhicules inno­vants, afin de présen­ter leurs ini­tia­tives. « Dans les économies émer­gentes, ce sont les 5 pre­miers dol­lars qui déblo­quent les 95 autres. Cepen­dant, ce cap­i­tal de départ est le plus dif­fi­cile à réu­nir, et c’est l’in­vestisse­ment que nous visons à entre­pren­dre pour déver­rouiller et réduire les risques. Nous créons des pipelines que d’autres investis­seurs peu­vent suiv­re », déclare Ahmed Saeed, directeur général d’ACP. De même, Astrid Man­roth, direc­trice du Fonds Mon­di­al pour les Infra­struc­tures, souligne com­ment le GIF, une plate­forme de col­lab­o­ra­tion mon­di­ale du G20, sou­tient les gou­verne­ments nationaux et les munic­i­pal­ités en leur four­nissant les ressources et l’ex­per­tise néces­saires pour met­tre en place des pro­jets d’in­fra­struc­ture sus­cep­ti­bles d’être financés. « Nous soutenons les pro­jets pour les aider à pass­er à l’échelle supérieure. »

Dans les économies émer­gentes, ce sont les 5 pre­miers dol­lars qui déblo­quent les 95 autres. Cepen­dant, ce cap­i­tal de départ est le plus dif­fi­cile à réunir

Ces ini­tia­tives se mul­ti­plient et sont essen­tielles pour attir­er au mieux les finance­ments privés. Il est toute­fois impor­tant de se rap­pel­er « qu’au­cun pro­jet n’est à l’év­i­dence rentable. C’est un proces­sus qui implique d’i­den­ti­fi­er les besoins pour le trans­former de manière adéquate et le struc­tur­er de manière qu’il devi­enne finançable. Ce n’est pas seule­ment une ques­tion d’ar­gent, mais aus­si une ques­tion d’ex­per­tise, de cap­i­tal humain », déclare Imad N. Fakhoury, directeur du groupe de finance­ment des infra­struc­tures à la Banque Mon­di­ale. En fin de compte, il est impor­tant de ren­forcer les capac­ités des pays eux-mêmes et de trans­fér­er l’ex­per­tise néces­saire pour dévelop­per la pré­pa­ra­tion des projets.

Passage à l’Adaptation en cours de route

En con­clu­sion, la COP28 a mar­qué un change­ment sig­ni­fi­catif dans l’ori­en­ta­tion du finance­ment du cli­mat, en par­ti­c­uli­er dans le domaine des mesures d’Adap­ta­tion. La con­férence a appelé à une par­tic­i­pa­tion accrue du secteur privé et à une col­lab­o­ra­tion ren­for­cée pour accélér­er la mobil­i­sa­tion du finance­ment privé de l’Adap­ta­tion. Les pays en développe­ment sont restés au cen­tre de l’at­ten­tion, car les effets du cli­mat s’y fer­ont sen­tir plus forte­ment, et des ressources con­sid­érables sont néces­saires pour met­tre en œuvre des straté­gies d’Adaptation.

Tra­di­tion­nelle­ment éclip­sé par les efforts d’at­ténu­a­tion, ce piv­ot vers les cap­i­taux privés pour l’Adap­ta­tion cli­ma­tique a mis en évi­dence le sou­tien néces­saire des four­nisseurs inter­na­tionaux et des insti­tu­tions de développe­ment pour réduire les risques liés aux oppor­tu­nités d’in­vestisse­ment et enfin, catal­yser effi­cace­ment les cap­i­taux privés. Des approches inno­vantes telles que le finance­ment mixte, les garanties et le cofi­nance­ment ont été présen­tées comme des solu­tions impor­tantes pour la mobil­i­sa­tion de cap­i­taux privés, ain­si que le développe­ment de pro­jets « renta­bles » afin d’attirer les investisse­ments privés. Ces straté­gies, asso­ciées à une meilleure disponi­bil­ité des don­nées, à des envi­ron­nements macroé­conomiques améliorés et à des poli­tiques adap­tées, sont essen­tielles pour sen­si­bilis­er les investis­seurs et chang­er la per­cep­tion selon laque­lle l’Adap­ta­tion est dif­fi­cile à soutenir par un finance­ment commercial.

Glob­ale­ment, l’Adap­ta­tion peut être un objec­tif d’in­vestisse­ment privé viable et, bien que les efforts col­lec­tifs aient été mis en évi­dence lors de la COP28, ils doivent encore être ren­for­cés pour combler l’im­por­tant déficit de finance­ment dans les pays en développe­ment11.

1Prési­dence de la COP (2023) Let­tre aux par­ties – COP28 EAU. Disponible à l’adresse : https://​www​.cop28​.com/​e​n​/​l​e​t​t​e​r​-​t​o​-​p​a​rties (con­sulté le 17 jan­vi­er 2024).
2700 mil­lions de dol­lars promis au fonds pour les pertes et dom­mages lors de la COP28 cou­vrent moins de 0,2 % des besoins (2023) The Guardian. Disponible à l’adresse :https://​www​.the​guardian​.com/​e​n​v​i​r​o​n​m​e​n​t​/​2​0​2​3​/​d​e​c​/​0​6​/​7​0​0​m​-​p​l​e​d​g​e​d​-​t​o​-​l​o​s​s​-​a​n​d​-​d​a​m​a​g​e​-​f​u​n​d​-​c​o​p​2​8​-​c​o​v​e​r​s​-​l​e​s​s​-​t​h​a​n​-​0​2​-​p​e​r​c​e​n​t​-​n​eeded
3OCDE (2023) Finance­ment du cli­mat fourni et mobil­isé par les pays dévelop­pés en 2013–2021. Disponible à l’adresse : https://​www​.oecd​.org/​c​l​i​m​a​t​e​-​c​h​a​n​g​e​/​f​i​n​a​n​c​e​-​u​s​d​-​1​0​0​-​b​i​l​l​i​o​n​-​goal/
4OCDE (2023) Accroître le finance­ment de l’adap­ta­tion dans les pays en développe­ment : Chal­lenges and oppor­tu­ni­ties for inter­na­tion­al providers : Lire en ligne, OCDE. Disponible à l’adresse : https://​read​.oecd​-ili​brary​.org/​e​n​v​i​r​o​n​m​e​n​t​/​s​c​a​l​i​n​g​-​u​p​-​a​d​a​p​t​a​t​i​o​n​-​f​i​n​a​n​c​e​-​i​n​-​d​e​v​e​l​o​p​i​n​g​-​c​o​u​n​t​r​i​e​s​_​b​0​8​7​8​8​6​2​-​e​n​#​p​age65.
5Quelle est la dif­férence entre l’adap­ta­tion et l’at­ténu­a­tion ? (2022) Agence européenne pour l’en­vi­ron­nement. Disponible à l’adresse : https://​www​.eea​.europa​.eu/​h​e​l​p​/​f​a​q​/​w​h​a​t​-​i​s​-​t​h​e​-​d​i​f​f​e​r​e​n​c​e​-​b​e​tween (con­sulté le 17 jan­vi­er 2024).
6Pro­gramme des Nations unies pour l’en­vi­ron­nement (2023) Adap­ta­tion gap report 2023 : Under­fi­nanced. Under­pre­pared. Inad­e­quate invest­ment and plan­ning on cli­mate adap­ta­tion leaves World exposed [Preprint]. doi:10.59117/20.500.11822/43796.
7Choi, E., Jang, E. et Lax­ton, V. (2023) What it takes to attract pri­vate invest­ment to cli­mate adap­ta­tion, World Resources Insti­tute. Disponible à l’adresse : https://​www​.wri​.org/​i​n​s​i​g​h​t​s​/​p​r​i​v​a​t​e​-​s​e​c​t​o​r​-​c​l​i​m​a​t​e​-​a​d​a​p​t​a​t​i​o​n​-​f​i​nance
8Ran­dall, T., Sede­mu­nd, J. et Bartz-Zuc­cala, W. (2023) Pri­vate invest­ment for cli­mate change adap­ta­tion – dif­fi­cult to finance or dif­fi­cult to see the finance ? Grantham Research Insti­tute on cli­mate change and the envi­ron­ment. Disponible à l’adresse : https://​www​.lse​.ac​.uk/​g​r​a​n​t​h​a​m​i​n​s​t​i​t​u​t​e​/​n​e​w​s​/​p​r​i​v​a​t​e​-​i​n​v​e​s​t​m​e​n​t​-​f​o​r​-​c​l​i​m​a​t​e​-​c​h​a​n​g​e​-​a​d​a​p​t​a​t​i​o​n​-​d​i​f​f​i​c​u​l​t​-​t​o​-​f​i​n​a​n​c​e​-​o​r​-​d​i​f​f​i​c​u​l​t​-​t​o​-​s​e​e​-​t​h​e​-​f​i​n​ance/
9BEI (2023) Fonds d’ac­tion cli­ma­tique pour les marchés émer­gents, Banque européenne d’in­vestisse­ment. Disponible à l’adresse : https://​www​.eib​.org/​e​n​/​p​r​o​d​u​c​t​s​/​e​q​u​i​t​y​/​f​u​n​d​s​/​e​m​e​r​g​i​n​g​-​m​a​r​k​e​t​-​c​l​i​m​a​t​e​-​a​c​t​i​o​n​-fund (con­sulté le 14 jan­vi­er 2024).
10En économie, le patient cap­i­tal est un mod­èle d’in­vestisse­ment pour des entre­pre­neurs qui créent des entre­pris­es et des organ­i­sa­tions dans des domaines où ils n’espèrent pas tir­er de prof­it rapi­de. Il per­met ain­si la mise en place de poli­tiques d’investissements publiques ou privées ori­en­tées pour accom­pa­g­n­er un secteur.
11Atteridge, A. (sans date) Pol­i­cy brief – Pri­vate Sec­tor Finance and Cli­mate Change Adap­ta­tion. Disponible à l’adresse : https://​www​.pre​ven​tion​web​.net/​f​i​l​e​s​/​1​2​3​7​9​_​p​o​l​i​c​y​b​r​i​e​f​p​r​i​v​a​t​e​s​e​c​t​o​r​f​i​n​a​n​c​e​a​d​a​p.pdf

Le monde expliqué par la science. Une fois par semaine, dans votre boîte mail.

Recevoir la newsletter